Paul Triquet

Lieutenant

1910-1980

 

Officier de milice canadien du 22ème Régiment qui combattit en Italie et précisément sur la Ligne Gothique en 1943.

Triquet nait et poursuit ses études à Cabano où il fait partie du corps de cadets local que dirige son père. En 1927, il s'engage dans le Royal 22e Régiment où il est rapidement promu au rang de capitaine après avoir été adjudant-chef durant plusieurs années. Pendant la Seconde Guerre mondiale, engagé dans la campagne d'Italie en tant que capitaine avec son régiment, il se distingue lors de la prise d'assaut de la Casa Berardi. Triquet culbuta plusieurs soldats allemands avec sa mitraillette Thompson. Il fut le seul Canadien-francais (et le deuxième Canadien) à se mériter la Victoria Cross durant la guerre. Cependant, il est blessé en Janvier 1944, brûlé à la jambe par un éclat d’obus. Il resta néanmoins avec son unité jusqu’en Février où, quand sa jambe s’infecta des suites de sa blessure, il dut avoir recours aux soins médicaux. C’est pendant le mois de mars qu’il reçut la Croix de Victoria et qu’il rentra aussitôt au Canada. Fin mars, le ministre de la Défense, Ralston, l’accueillit en héros à Montréal au côté des autorités catholiques, du maire de Montréal et des hauts gradés du district militaire No. 5.

Pour Triquet, cela n'a pas été facile de vivre avec l'étiquette de héros dans une société majoritairement peu portée sur la chose militaire. Le cas de l'aviateur Beurling en est un exemple patent. Son cas va représenter un dilemme pour l'armée canadienne. D'une part, les autorités militaires furent très contentes de l’avoir au Canada pour prononcer des discours afin de soutenir le recrutement et le financement de l’effort de guerre; mais d'autre part, ils ne pouvaient pas garder un héros de guerre hors combat, surtout quand il répétait sans cesse qu’il avait hâte de retourner dans son unité. En fait, le rôle d’un héros de guerre n’était pas bien défini. En mars 1943, le seul précédent pour une Croix de Victoria canadienne de la Deuxième Guerre mondiale était Cecil Merritt qui s’était distingué à Dieppe mais avait été fait prisonnier par les Allemands. Parmi les 16 Croix Victoria remises à des Canadiens pendant la guerre, sept le furent à titre posthume, deux à des prisonniers de guerre et les autres à des soldats ayant subi des blessures graves. Pour les héros valides, la question ne se posait donc pas souvent, mais avec Paul Triquet, il fallut y répondre: un décoré de la plus haute décoration militaire devait-il retourner au combat? Les autorités canadiennes se tournèrent vers les Britanniques pour avoir une réponse, mais leur réponse ne fut pas plus claire: le nouveau commandant de la 8e armée, Leese, était d’avis de le retirer des opérations, tandis que l’ancien commandant B. L. Montgomery était d’avis qu’il n’y avait pas de règle et que cela dépendait donc de chaque cas. À propos de Paul Triquet, ce n’est pas le cas d’une victoire militaire qui a été retenu (même si la bataille à Casa Berardi avait des éléments de réussite, il y eut aussi des pertes). Est-ce que la médaille fut une tentative d’aider le moral des troupes? Est-ce qu’un candidat francophone fut particulièrement souhaité par les autorités britanniques et canadiennes afin d’aider le recrutement et les levés de fonds au Canada? Il y a sans doute plusieurs considérations qui entrent en jeu quant au choix des autorités, mais il faut souligner que ces autres considérations n’enlèvent en rien au mérite de Paul Triquet durant ses accrochages avec l'ennemi.

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