L'Angleterre

Cimetière de Delville

Durant la Première Guerre mondiale, l'Angleterre avait mobilisé 5 millions d'hommes. Sur ce nombre, plus de un million furent tués et presque autant ont été blessés à des degrés divers. Durant les premières années de l'entre-deux guerres, on aurait dit que ce pays était peuplé de veuves et d'orphelins. L'impact psychologique causé par les pertes humaines durant ce conflit allait être le faceur déterminant du sentiment isolationniste et pacifiste manifesté par la société britannique. La paix étant revenue, l'Angleterre tourna le dos au vieux continent et mit tout ses espoirs dans la Société des Nations, perçue comme l'instrument idéal pour désamorcer d'éventuels conflits. L'Angleterre s'était très endettée durant la guerre 1914-18 et opta rapidement pour une politique d'austérité budgétaire. La première victime des coupures a été l'armée de terre, suivie de la marine qui a été réduite à sa plus simple expression... Sa structure administrative passa de la division au régiment, si bien que le but premier de cette petite armée de réguliers serait désormais de servir de cadres pour l'armée des Indes, puisque celle-ci était toujours considérée comme le joyau de l'Empire britannique. Ensuite, ce fut le tour de l'aviation qui passe au couperet: en 1918, la Royal Air Force (RAF) comptait 22,000 avions de tout types, dont 1600 en opération sur le front occidental. Un an plus tard, elle était réduite à 120 appareils. L'Angleterre ne s'était non seulement endettée mais elle verra bientôt ses responsabilités s'accroître avec l'élargissement de son empire colonial via le système des mandats de la Société des Nations (SDN). L'Empire britannique avait été la première entité coloniale du monde – il régnait sur le quart de la planète – et, durant la Première Guerre mondiale, il avait montré sa cohésion. Cependant, la décision d'accorder une autonomie croissante à certaines colonies y apporta d'importantes transformations. Durant l'entre-deux guerres, la préoccupation nationale britannique s'identifiait à la mystique de son empire autour duquel les forces vives devaient se mobiliser. Mais en réalité, les Britanniques étaient amenés à exercer leur autorité sur des entités différentes, éloignées les unes des autres – auxquelles vont s'en ajouter de nouvelles à partir de 1920 – et avec moins de ressources financières et matérielles pour les administrer.

__________

De l'Empire au Commonwealth

En 1914, cet empire comprenait quatre dominions: Canada, Australie, Nouvelle-Zélande et l'Union sud-africaine. L'Irlande s'y ajouta en 1923. Ces dominions étaient entièrement autonomes en politique intérieure, mais n'étaient pas maîtres de leurs politique extérieures ni de leur défense. On se souvient de la demande qu'avait faite le premier ministre canadien, Borden, pour que le Canada ait son mot à dire dans la détermination de la politique étrangère. L'Angleterre accepta et à la Conférence de paix, les dominions obtinrent une représentation réparée et chacun d'eux signa le traité. C'est en 1926 qu'un pas important fut franchi. Une conférence impériale donna une nouvelle définition de l'empire. L'Angleterre et ses dominion sont "des communautés autonomes au sein de l'empire britannique, égales en statut et nullement subordonnées l'une à l'autre dans aucun aspect de leurs affaires intérieures ou extérieures, mais unies par une allégence commune à la couronne et librement associées comme membres du Commonwealth britannique". La conférence impériale de 1930 donna aux dominions le droit de proposer eux-mêmes leurs gouverneurs-généraux. A la demande de l'Irlande et de l'Afrique du Sud, elle proclama le droit à la sécession pour chacun des membres de l'empire. Pour baliser le commerce impérial et redresser partiellement les finances britanniques, une décision financière fut prise de rétablir le protectionnisme en 1931. Le Parlement britannique vota une loi importante: le Statut de Westminster. Il fut ratifié par les dominions et précisait que le parlement londonien ne pourrait plus voter des lois intéressant les dominions – comme les lois douanières – sans leur accord respectif. Ce Statut fut complété par les Accords d'Ottawa en 1932. Durant l'entre-deux guerres, les milieux financiers britanniques étaient engagés dans une compétition de plus en plus inégale avec leur principal rival économique, les États-Unis, qui étaient d'ailleurs leur principal créancier depuis 1915. Les deux nations anglo-saxonnes se livrèrent d'âpres luttes commerciales pour les marchés mondiaux et leurs ressources naturelles. Les affairistes américains réussirent à percer et contourner le protectionnisme impérial britannique, mais ce fut difficile pour eux de mener des affaires. (voir l'onglet "États-Unis").

Le Moyen-Orient

De la Méditérannée à l'Inde, la politique britannique a toujours consisté à s'assurer des positions solides. Avant 1914, l'amitié avec l'Empire ottoman, l'occupation de l'Égypte, une zone d'influence en Iran et un protectorat de fait sur l'Afghanistan en étaient les bases. La dislocation de l'Empire ottoman amena l'Angleterre à fonder sa politique sur des données nouvelles dont "l'amitié avec les Arabes" était le principe essentiel. Après la guerre, ils transformèrent les mandats de la SDN en zones à l'intérieur desquelles des émirs obéissants furent installés: Ibn Séoud dans la péninsule d'Arabie, Faycal en Iraq, Abdallah en Transjordanie, dont cette dernière fut détachée de la Palestine. En 1930, l'Iraq cessa d'être un mandat. Un traité anglo-iraquien lui donna l'indépendance, tout en permettant aux Anglais d'y faire venir des troupes en cas de guerre; l'Iraq fut même admise à la SDN en 1932:

Égypte – Les Britanniques proclament l'indépendance égyptienne en 1922 tout en y maintenant leur occupation et leur contrôle du canal de Suez. Mais l'Angleterre laissa trainer les choses, et l'Égypte ne sera indépendante qu'en 1936, surtout à cause de l'invasion italienne de l'Éthiopie, qui fait peser une menace sur le Soudan. L'Égypte entra en 1937 à la SDN.

Palestine – Les Britanniques se heurtèrent au problème insoluble de la rivalité entre Juifs et Arabes. Ils ne furent pas très habiles car une fois le foyer national juif créé, les Britanniques ont manqué de vision dans la gestion globale d'une Palestine, dont la cohésion sociale devenait de plus en plus érodée par une immigration illégale juive. Des troubles n'allèrent pas tarder à éclater.

Iran – Les Britanniques constituèrent une importante compagnie pétrolière: l'Anglo-Iranian Oil Company. Mais la prise du pouvoir par un militaire, Reza Khan, qui devait prendre le titre de Shah en 1921, rapprocha l'Iran de l'URSS. Qui plus est, l'Allemagne y prit une position dominante sur le plan économique à partir de 1930.

Émirats – Les Britanniques avaient également établi leur protectorat sur les petits émirats situés sur la côte du Golfe persique – dont le Koweit – riches en pétrole.

Afghanistan – Après 1919, les Britanniques décidèrent d'abandonner leur protectorat de fait qu'ils y exerçaient. L'Afghanistan devint complètement indépendant.

__________

La politique intérieure

En 1925, les conservateurs furent élus et le nouveau premier ministre, le nonchalant Stanley Baldwin, voulut profiter de l'élan de cette prospérité en réformant la monnaie et en prônant un "retour à la normalité" dans la gestion interne des affaires. La surévaluation de la livre sterling nuisait à la restauration de l'économie britannique et au plein emploi. La grève de 1926 produisit un durcissement du gouvernement conservateur. Le 4 Mai 1926, toute l'économie fut paralysée (docks, transports, production, gaz, électricité) par une grève générale. Il n'y eut pas de journaux. La population eut l'impression que Baldwin déclarait la guerre à la classe ouvrière. Le gouvernement se fit donner les pleins pouvoirs, prétextant une situation d'urgence. Mais les meneurs de la grève flanchent et celle-ci échoua. Seuls les mineurs la poursuivirent, mais faute de soutien, furent obligés de rentrer au travail avec une réduction de salaire. Une loi de 1927 limita le droit de grève, mécontenta les travailleurs qui élirent le parti travailliste en 1929. Mais le second gouvernement travailliste fut victime des conséquenses de la Crise économique mondiale. Le chômage passa de 1.1 à 2.3 millions de chômeurs en 1930. Dans cet attelage politique à trois que constitue la vie politique britannique (travaillistes, libéraux, conservateurs), les libéraux étaient les arbitres de la situation en soutenant les travaillistes. Mais lorsque la crise s'accrut (retrait massif de capitaux américains et nouveaux prêts à l'étranger), ils retirèrent leur soutien aux travaillistes pour appuyer les conservateurs. Les élections d'Octobre 1931 firent élire les conservateurs de Baldwin, mais le premier ministre libéral MacDonald restait au pouvoir. Ce dernier consolida la maimise des conservateurs en conservant un gouvernement d'union nationale très affaibli. Mais son cabinet de coalition comprenait le nouveau ministre des Finances: Neville Chamberlain.

_

Manifestation de vétérans au chômage en 1925 - La police chargeant les grévistes londoniens en 1926

A partir de 1935, les exportations britanniques s'accroissent, les devises étrangères reviennent, le niveau de vie augmente progressivement, et ce fut le marché intérieur qui absorba la production croissante du pays. Si la production textile crée surtout des chômeurs, celle de l'acier passa de 9.6 millions de tonnes en 1929 à 13.5 millions en 1937. La production d'électricité doubla entre 1931 et 1937. Enfin, la construction de maisons (surtout des logements sociaux mieux aménagés) atteignit des résultats spectaculaires, passant de 150,000 par an en 1920 à 346,000 en 1936. Ce n'était pas du "planning" selon l'économiste Keynes ou du "dirigisme" à la Roosevelt, mais le gouvernement britannique introduisit un certain contrôle dans l'économie. De surcroit, il faut noter que les Britanniques, contrairement aux Allemands, n'ont pas essayé de résoudre le problème du chômage par le réarmement, malgré les avertissements lancés par Churchill. C'est seulement à l'automne 1935 que l'on commença à accroitre les budjets militaires.

__________

La politique extérieure

Les cinq dernières années de l'entre-deux guerres furent dominées par la politique extérieure. Pendant plus de quinze ans, le peuple anglais, résolument pacifiste, a tardé à comprendre le danger que représentait Hitler. Il était ambivalent: il souhaitait ardamment la paix mais sentait qu'il était pris dans un engrenage politique qui le conduirait à la guerre. En Juin 1935, une vaste enquête appelée Peace Ballot incitait les gens à voter pour la paix: elle récolta 11 millions de signatures. Presque toutes se déclaraient en faveur de la SDN. A la question En cas d'agression, est-ce que les autres nations doivent s'associer pour l'arrêter par des mesures militaires? 6.7 millions répondirent "oui". En fait, l'Angleterre a cru à la Société des Nations beaucoup plus que la France et les autres pays européens. Sa population ne comprenait pas que la SDN ne pouvait pas jouer son rôle comme arbitre des conflits (clip ci-bas).

_

Pas encore une nouvelle guerre? – Chamberlain ira visiter Hitler pour clarifier la situation tchèque

La population était terrifiée à l'idée d'être attaquée par des avions. La littérature et les films de science-fiction de l'époque exacerbaient la terreur aérienne. Dans le film Shape of Things to Come, tiré du livre de H.G.Wells, on montra Londres et les villes anglaises attaquées et rasées par des attaques aériennes. Cette terreur fut confirmée par les actualités montrant les bombardements en Éthiopie et en Espagne. En ce qui concerne l'éventualité d'une guerre européenne, les Britanniques ne furent pas des visionnaires. En 1919, s'en remettaient à la règle des dix ans, à savoir qu'il était peu probable qu'une puissance européenne puisse poser une menace contre l'Angleterre; beaucoup croyaient encore que la France représentait le plus grave danger. Lorsque les Français ont occupé la Ruhr, l'initiative française a fortement impressionné le gouvernement britannique qui y a même vu un geste à caractère "hégémonique". Cette impression de puissance française durera vingt ans et eut deux conséquenses chez les Britanniques:

  • Une surestimation de la puissance militaire française.
  • Une sous-estimation de la puissance militaire allemande.
  • En 1935, cette-dite impression fut confirmée par la signature d'un pacte naval anglo-allemand, où l'Angleterre – sans consulter la France – essaya de préserver la paix en jouant le jeu de l'équilibre européen, comme autrefois. Au lieu de préserver la paix, cet accord naval permit à l'Allemagne de se doter d'une flotte de guerre.

    Le réarmement

    Devant les craintes populaires de bombardements aériens et les événements d'Éthiopie et d'Espagne, il n'était pas question que le gouvernement britannique consacre des budjets afin augmenter la taille de l'armée de terre pour former un corps expéditionnaire, convaincu que l'opinion publique n'accepterait jamais que l'on envoie l'armée se battre hors des îles britanniques. Il opta, dès 1935, à consacrer des dépenses de plus en plus importantes aux défenses aériennes. Les deux initiatives furent:

  • L'adoption du nouveau chasseur monoplan Hurricane en 1935.
  • La construction d'une première chaine de radars côtiers en 1937-8
  • Le premier outil était le chasseur jugé le plus rapide et le plus maniable de son époque, et l'autre était un pari scientifique qui permettait de repérer un ou plusieurs avions à 120 milles de distance. Des tests fructueux permiront aux Britanniques d'affirmer que "grâce au radar, l'Angleterre est redevenue une île". Cependant, toutes ces dépenses se firent aux détriments d'une armée déjà réduite.

    Une politique d'apaisement

    Lorsque Neville Chamberlain devint premier ministre en 1937, il établit une politique dite d'apaisement (appeasement) dont le but était d'amadouer et de réduire les ambitions des dictateurs. Elle s'inscrivait parfaitement avec la volonté de la population britannique d'écarter à tout prix le spectre de la guerre. Le raisonnement de base de cette politique se résumait ainsi: pourquoi risquer une guerre avec un turbulent si l'on peut l'éviter grâce à un accomodement? Avec l'Italie mussolinienne, il était facile de lui brandir le spectre d'un embargo maritime et une chute de devises étrangères. Mais devant Hitler, Chamberlain était de ceux qui considéraient que l'Allemagne avait été traitée trop durement en 1919, et que certaines de ses renvendications territoriales étaient justifiées. De surcroit, comme l'Allemagne commençait à se réarmer, cela donnait le temps requis de négocier raisonnablement avec lui avant qu'elle ne devienne trop dangereuse. La concession était perçue comme le moyen approprié de satisfaire l'appétit d'un turbulent au lieu de l'aiguiser. Ce fut une grave erreur de jugement pour la diplomatie britannique:

    Sarre – L'Angleterre ne dit mot quant aux résultats du plébiscite de 1935.

    Rhénanie – L'Angleterre trouvait qu'il ne fallait pas indisposer la France, mais toléra son geste de 1936.

    L'Autriche – L'Angleterre se borna simplement à protester.

    Sudètes – L'Angleterre dit au Tchèques d'abandonner les territoires convoités par Hitler.

    Mais, devant les intentions allemandes de décortiquer le territoire tchécoslovaque, Chamberlain prit une initiative qui, à cette époque, étonna d'admiration la population britannique: il entreprit d'aller chez Hitler par avion pour régler cette question. L'ennui pour Chamberlain, c'est qu'il ne put négocier en position de force car il n'avait pas de force armée derrière lui; il dut marchander avec Hitler en position de faiblesse. Chamberlain accepte le rattachement des Sudètes à l'Allemagne à condition qu'il ne recourt pas à la force. Hitler accepta. Mais le lendemain, ce dernier fit monter les enchères: les Sudètes devaient être occupées militairement dans les dix jours. Chamberlain dut se résigner, et fut momentanément consolé par la promesse que cette annexion serait la dernière revendication territoriale de l'Allemagne nazie. Chamberlain et Hitler signèrent à la fois ces accords de Munich. Pour le premier ministre anglais, Munich serait le prélude à un règlement général en Europe. De retour à Londres, il fut acceuilli en libérateur, et les médias le surnommèrent Chamberlain the peacemaker. Cependant en privé, Chamberlain était désillusionné. Il confia à son secrétaire privé, Hume, qu'il n'était pas facile de négocier avec "ce type", mais qu'il n'avait pas le choix car Hitler était le maitre de l'Allemagne. Chamberlain espérait qu'Hitler respecterait sa signature. Du côté de la gauche travailliste – favorable à la paix, ne l'oublions pas –, Chamberlain avait payé trop cher une paix provisoire et ne manifestait que mépris à l'égard du premier ministre.

     Tchécoslovaquie – Chamberlain accuse férocement Hitler d'avoir trahi les accords de Munich.

    Aussitôt, le ton changea en Angleterre. Le pays se préparait fébrilement à la guerre et Chamberlain rencontra son homologue français, Daladier, pour mettre sur pieds la collaboration militaire franco-anglaise. Le rhytme des efforts de réarmement augmenta, au point d'épuiser de nombreux ouvriers d'usine. Mais durant cinq mois, le taux de production mensuel d'armements dépassa celui de l'Allemagne, avant son ralentissement. Les dépenses reliées à cette cadence de réarmement furent telles qu'au début de 1939, le ministre des Finances dit à Chamberlain qu'à ce rhytme de dépenses, nous courrons droit vers la faillite.

    Chamberlain approuva la formation du corps expéditionnaire britannique. Bien que les officiers d'État-major l'avait conçu sur papier depuis longtemps, il se constitua dans des délais trop brefs pour être un instrument bien huilé et dissuasif à utiliser dans des négociations. En Septembre 1939, il ne sera pas l'instrument offensif tel qu'escompté par les Britanniques.

    La Pologne

    Les doutes de Chamberlain ne tardèrent pas à se confirmer. Après avoir digéré la Tchécoslovaquie, Hitler dénonçait le pacte de non-agression qui le liait à la Pologne. Dès Avril 1939, il donna une garantie militaire à la Pologne pour la protéger d'une attaque allemande. Sur le plan stratégique, garantir la sécurité militaire de la Pologne était une folie. Les archives diplomatiques britanniques ne nous permettent pas de voir quelles ont été les motivations qui ont incité Chamberlain et ses hauts-fonctionnaires du Foreign Office à venir au secours de Polonais. Néanmoins, l'octroi de cette garantie impliquait une entrée en guerre de l'Angleterre en cas d'agression allemande contre la Pologne; une entrée en guerre dans laquelle l'Angleterre manquait de préparation, et surtout d'entrainement. Pour qu'elle soit valide sur le plan stratégique, cette garantie devait reposer sur trois conditions:

    1. Un accès rapide et aisé au territoire polonais – le facteur distance l'interdisait.
    2. Une coopération militaire réelle et bien affichée avec la France – elle était de facture trop récente.
    3. Une alliance militaire avec les Soviétiques – jugée trop menaçante par les Polonais.

    En conséquence, cette garantie militaire britannique restait sans valeur sans l'aide de l'URSS. Bien que la volonté y était du côté franco-anglais, les efforts de concertation avec les Français et surtout les Russes furent trop tardifs. En Août 1939, une délégation militaire franco-anglaise arriva en train – sans se presser – à Moscou pour établir les bases d'une telle coopération militaire. Mais cette mission militaire n'avait pas de consignes précises et était dirigée par des officiers ayant peu d'envergure pour être retenue comme intéressante pour Staline. De plus, l'Allemagne nazie la prit de vitesse.

     Pacte germano-soviétique – Le 22 Août 1939, le ministre allemand des Affaires étrangères, Ribbentrop, arriva à Moscou pour officialiser les nouveaux "intérêts communs" germano-russes à l'Est. Staline récupérait ce qu'il désirait en Europe orientale, et Hitler obtenait son aire de départ pour sa marche vers l'Est. Là où les deux signataires étaient unanimes, c'était dans la disparition de la Pologne comme État et le partage de son territoire. Les médias britanniques n'ont pas saisi l'essence de ces "intérêts nouveaux" après l'invasion de la Tchécoslovaquie: qu'est-ce que devient le Pacte anti-Komitern? Où est l'esprit de Mein Kampf?. Hitler avait, en fait, les mains libres à l'Est et la guerre européenne devenait inévitable.

    Sans une alliance militaire avec les Soviétiques, l'Angleterre se retrouvait seule avec son allié français affaibli pour gérer l'invasion inévitable de la Pologne. Durant l'entre-deux guerres, la société britannique hantée par la guerre avait tout fait pour éviter la guerre; elle était prête à presque toutes les compromissions pour sauvegarder la paix. Selon l'historien Corelli Barnett, il était impossible de trouver un coupable dans la classe politique britannique. Les diplomates et politiciens venaient de ce même peuple, et ils partagaient ses angoisses, ses craintes et ses espoirs. Barnett affirme dans son livre L'Effondrement de la puissance britannique que le seul coupable fut l'illusion de tout le peuple britannique. Il ne restait à voir comment le Corps expéditionnaire britannique – ou BEF – serait en mesure de redresser la situation sur le continent.

    _________________________________

    © Sites JPA, 2021