Henri Frenay

Activiste

1905-1988

Activiste et politicien français qui a fondé le mouvement de résistance Combat, regroupant surtout des résistants de droite.

Né à Lyon d'une famille de militaires peu intéressée par la politique. Il fait ses études à Lyon et entre à l'École de St-Cyr en 1919 et en sort officier en 1924. Frenay est affecté dans l'armée du Rhin. Il rejoint ensuite en Syrie le 16e régiment de tirailleurs tunisiens puis le 8e bataillon assyro-chaldéen à Kamechliyé. En 1933, il revient en métropole, à Hyères, au 3e régiment alpin d'infanterie. Il effectue également un stage d'observateur aérien. En 1935, il rentre à l'École supérieure de guerre où il se lie d'amitié avec Robert Guédon. Il rencontre également Berty Albrecht, qui est une protestante féministe proche des milieux marxistes, en 1934. Grâce à elle, il entre en contact avec des réfugiés allemands anti-nazis et en vient à s'intéresser au nazisme dont il découvre alors les dangers au travers de la lecture attentive de Mein Kampf. En 1938, Frenay suit les cours du Centre des hautes études germaniques et rédige un mémoire sur l'Allemagne contre l'Hitlérisme.

Lorsque la guerre éclate, le capitaine Frenay occupe des fonctions d'état-major sur la Ligne Maginot. Le 13 Juin 1940, le 43e corps d'armée dont il fait partie reçoit l'ordre de repli pour, quatre jours plus tard, être fait prisonnier par l'armée allemande. Henri Frenay réussit à s'évader, avec l'adjudant Bourguet. À pied, ils gagnent la zone libre où ils arrivent le 15 juillet. Affecté en garnison à Marseille, Frenay prend vite conscience de la gravité de la situation. Sensibilisé très tôt aux considérations idéologiques allemandes grâce aux rencontres organisées par Albrecht, et convaincu que la France finira par se relever, il se met en devoir de rassembler autour de Berty Albrecht et lui, en août 1940, un début de réseau pour ce qui sera le premier mouvement historique de Résistance intérieure, le Mouvement de libération nationale (MLN). Dans cette même période, il parvient rapidement à diffuser un Bulletin d'information et de propagande. Dans ces débuts de la Résistance Intérieure, le but n'est pas le combat contre le Régime de Vichy. Frenay, en particulier parce qu'il est militaire, voit en Pétain un ancien maréchal de la Grande Guerre sur lequel le bénéficie du doute peut jouer. L'espoir des militants réside alors dans le possible double jeu de cet homme, qui "prépare forcément le salut de la France d'une manière ou d'une autre" . Il changera vite d'avis lorsqu'il percevra l'influence décisive pro-nazi de Laval sur Pétain. Frenay est muté au Deuxième Bureau de l'État-Major de l'Armée (service du renseignement militaire) à Vichy, d'où il continue son action, unissant les mouvements naissants de chaque province, tout en prenant soin de respecter un cloisonnement très strict pour éviter tout "coup dur". De la suite de ces fusions successives, le MLN est renommé en MLF, Mouvement de Libération Française. Le 24 Janvier 1941, Frenay demande à être mis en congé d'armistice dans une lettre exprimant sa perte de confiance vis-à-vis du Haut commandement. Il est reçu par le chef d'État-Major de l'Armée, le général Picendard qui tente de le convaincre de rester. Devant sa détermination, le général Huntziger accorde le congé d'armistice. Henri Frenay garde néanmoins de nombreux contacts avec l'armée et notamment avec le Deuxième Bureau.

Recherché en zone occupée par la Gestapo et en zone libre par la police française, Frenay plonge rapidement dans la clandestinité et adopte différents noms d'emprunt comme Henri Francen, Morin, Molin, Nef, Lefèvre, ou Charvet, nom sous lequel il était connu des services britanniques. En zone libre, son journal Vérités, après la fusion avec Liberté, se transforme en Combat fin 1941, dont le sous-titre est "Organe du mouvement de la Résistance Française". Frenay est contacté par le général Benoît-Léon Fornel de La Laurencie dont l'OSS voudrait faire un rival du général de Gaulle. Libération Nationale bénéficie alors de la manne des services américains. La situation aboutit à une rupture. Frenay travaillera en bonne intelligence avec le mouvement Franc-Tireur animé par son ami Jean-Pierre Lévy, mais plus difficilement avec le dernier mouvement Libération animé par Emmanuel d'Astier de La Vigerie. Pour Frenay, les intentions réelles ou supposées du maréchal (collaboration, double jeu...) n'entrent pas en ligne de compte : résister est un devoir. Fin 1941, il consent à faire du général de Gaulle le symbole de la Résistance française, mais il accepte très mal l'autorité de ses délégués. En juillet 1941, il rencontre un ancien préfet, Jean Moulin, ancien collaborateur du ministre Pierre Cot, lequel, après avoir prêté serment d'allégeance au Maréchal Pétain, a été démissionné de la "préfectorale" en raison de ses accointances avec les réseaux communistes - qui cherche à prendre la mesure des mouvements intérieurs de résistance. C'est Henri Frenay qui l'informera de la situation en tant que missionnaire du Général de Gaulle et l'introduira à la clandestinité, faisant confiance à cet inconnu accrédité et semblant faire l'affaire . Il lui dévoile l'organisation du réseau "Combat" mais arrange aussi les réunions avec d'Astier et Lévy.

En zone libre, Henri Frenay cherche à prendre le commandement militaire de la Résistance française lors de la fusion des trois plus importants mouvements de la zone libre (Franc-Tireur, Libération, Combat), ce qui aboutit à des discussions avec de Gaulle (jugé lointain et donc peu opérationnel) et son représentant, Jean Moulin (jugé incompétent et politiquement instable du fait de son engagement en tant que franc-maçon dans des réseaux communistes internationalistes). La création des Mouvements unis de la Résistance ou MUR dont il est, quoique réticent, l'un des membres du Comité directeur (présent aussi, Pierre Dumas (résistant), secrétaire général du mouvement) ne l'empêchera pas de chercher à rendre son mouvement (Combat) le plus autonome possible vis-à-vis de Londres. Ses désaccords avec Jean Moulin, délégué du général de Gaulle pour diriger la Résistance politique et militaire en France, reposent sur le fait que celui-ci cherchait à diminuer l'efficacité des MUR au profit de certaines mouvances pro-soviétiques qu'il contrôlait directement via le Parti Communiste clandestin. De Gaulle et Moulin voulaient surtout séparer le combat politique de la résistance militaire, considérant que c'était au gouvernement exilé à Londres puis à Alger d'assumer la fonction politique sous son patronage, alors que Frenay, plaidant l'échec du régime des partis de la IIIe République, considérait que la résistance devait avoir sa place en tant que mouvement politique autonome dans la création de nouvelles institutions après-guerre et ne devait pas accueillir les anciens partis et leurs réseaux en son sein. Le fait est que Jean Moulin, en accaparant ces deux moyens, est allé trop loin et est à l'origine de certains échecs de la Résistance, notamment dans le Vercors. Henri Frenay, accompagné de d'Astier, part le 17 Septembre 1942 pour Londres, en passant par Gibraltar. Il rencontre le général de Gaulle, le chef de la France libre, et retrouve finalement en lui, entre militaires, la plupart de ses conceptions de la Résistance. Il prend aussi contact avec les membres du BCRA dont le colonel Passy. C'est à ce moment que le Général de Gaulle l'admet dans le Gouvernement Provisoire de la France Libre.

Après la guerre, Frenay qui avait joué un grand rôle dans la Résistance Intérieure. rêvait d'un rôle d'ampleur au ministère de l'Intérieur du Comité français de la Libération nationale d'Alger. Néanmoins, du fait de ses idées opposées à celles de De Gaulle, il est quelque peu écarté de la reconstruction, obtenant un poste de second plan dès Novembre 1943, le Commissariat aux Prisonniers, Déportés et Réfugiés (PDR), poste qu'il conservera au Gouvernement provisoire de la République française, en 1944 et jusqu'au 21 Octobre 1945. Il s'attelle néanmoins à la tâche ardue d'assurer le retour en France des 1,330,000 prisonniers, réfugiés et déportés de la zone alliée et de les réintégrer dans la vie nationale en quatre mois (entre Avril et Juillet 1945). Les déportés français de la zone soviétique sont libérés plus lentement. Henri Frenay et son ministère doivent fournir la liste complète des disparus que les autorités russes recherchent alors dans les camps où elles sont les seules à pouvoir entrer. La charge de ministre de Henri Frenay s'arrête lorsque le gouvernement provisoire de la république française remet ses pouvoirs à l'Assemblée constituante en novembre 1945. Il est d'avis que la Résistance ne doit pas s'arrêter au dernier coup de canon, mais devenir le moteur d'une reconstruction politique et sociale du pays. De Gaulle, qui n'en n'a que faire de la résistance intérieure après la libération, le marginalisera. Outré, Frenay va rompre définitivement avec de Gaulle.

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Ó Sites JPA, 2013