Guadalcanal

Les échecs successifs en Mer de Corail et en Nouvelle-Guinée privèrent les Japonais d'une base aérienne qui leur aurait permis de s'assurer la maîtrise du ciel sur tout le Pacifique Sud-Ouest. Les avions japonais de Rabaul ne pouvaient pas établir une couverture aérienne dans cette région, sans se poser en Nouvelle-Guinée. Dès lors, le centre de gravité de la stratégie japonaise dans le Pacifique se déplaça de la Nouvelle-Guinée vers l'archipel des Salomons. Le QG impérial japonais choisit de construire un grand terrain d'aviation sur l'île de Guadalcanal. L'aviation japonaise pourrait contrôler tout le Pacifique Sud-Ouest et isoler complètement l'Australie des Etats-Unis. Cette grande île des Salomons serait l'enjeu d'une bataille d'usure de six mois. La bataille de Guadalcanal et la campagne des Salomons illustrèrent l'importance primordiale que les belligérants accordaient aux bases aériennes terrestres: les terrains d'aviation insulaires étaient la clé du succès militaire dans le Pacifique. Leur contrôle était impératif pour les belligérants. Certes, le porte-avions de la Seconde Guerre mondiale est un outil redoutable, flexible et remarquablement polyvalent, mais il ne peut pas remplacer une base aérienne terrestre; car, celle-ci peut à la fois loger un plus grand nombre d'avions et bombarder/surveiller avec des appareils à long rayon d'action.

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L'île

Guadalcanal était une possession australienne administrée sous un mandat de la SDN. Cette île de 90 milles de longueur par 25 milles de largeur comprenait une faible population indigène micronésienne. Sa topographie riveraine était plutôt plate et pouvait accomoder des terrains d'aviation, mais le centre de l'île demeurait valloné, voire même escarpé. Une jungle épaisse, humide et poisseuse recouvrait la plus grande superficie de l'île. Tout comme en Nouvelle-Guinée, les journées étaient torrides et se terminaient par la sempiternelle averse quasi-quotidienne qui diminuait la visibilité, et trempait la peau jusqu'aux os – l'écoeurement suprême du soldat. Guadalcanal pouvait recevoir pouces de pluie annuellement. Le sol terreux se transformait en mer de boue. Les rivières nombreuses et les marécages fétides étaient infestés de sangsues et de reptiles vicieux. Les berges de certaines d'entre elles abritaient des alligators. Le feuillage grouillait souvent d'oiseaux bruyants. Des nuages d'insectes véhiculaient le palmarès complet des maladies tropicales. Les eaux calmes et poissonneuses des lagons peu profonds étaient fréquentées par des requins nombreux et gourmands. Il n'est pas étonnant que les Micronésiens aient préférés s'installer sur les îles voisines de Toulagi et de Gavutu exposées aux vents, plus petites et hospitalières.

Guadalcanal

Les Japonais avaient déjà occupé l'île voisine de Toulagi, siège du Proctectorat australien de l'archipel des Salomons. Ils y avaient aménagé un quai d'hydravions qui fut attaqué durant la bataille de la Mer de Corail. La station d'écoute japonaise de Toulagi n'inquiétait pas les autorités américaines. Par contre, lorsque les Japonais ont débuté la construction d'un terrain d'aviation dans la plaine de Lunga sur l'île de Guadalcanal, Australiens et Américains s'inquiétèrent. Ce terrain a été photographié par un quadrimoteur B-17 dès le mois de Juillet.

Le plan Watchtower

Au moment où les Japonais débarquèrent à Toulagi, les troupes américaines les plus proches étaient basées à 550 milles de là, sur l'île Espiritu Santo. A Washington, le général Marshall et l'amiral King ordonnent à leurs subordonnés d'organiser une opération pour chasser les Japonais de Toulagi et de prendre Guadalcanal pour s'en servir comme tête de pont de la reconquête du Pacifique: l'Opération Watchtower. Lorsque conquise, Guadalcanal servirait de base aérienne – la Tour de garde – pour bombarder la grande base japonaise de Rabaul, en Nouvelle-Bretagne. La prise de Toulagi et de Guadalcanal fut confiée à la 1ère Division de Marines US commandée par le major-général Vandergrift. Ce dernier était un vétéran des combats de jungle d'Amérique centrale, mais sa division était hétérogène: on y retrouvait des soldats expérimentés, un petit groupe de soulards, et un bon nombre d'inexpérimentés entre 17 et 21 ans. Cette division fut amenée à Wellington en Nouvelle-Zélande et partit pour Guadalcanal le 7 Août.

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Le contre-amiral Turner et le général Vandergrift – Les Marines débarquent

La force amphibie qui amenait ces Marines à Guadalcanal était commandée par le contre-amiral Turner qui l'escortait avec ses croiseurs et deux porte-avions. Comme il s'agissait d'une opération menée par des fusiliers-marins, l'amiral King insista pour qu'elle soit dirigée par l'US Navy. Le gouvernement Roosevelt n'y voyait aucun inconvénient et déplaça la "borne" du théâtre d'opération du Pacifique Sud-Ouest de quelques degrés plus à l'Est pour que l'île de Guadalcanal soit placée sous le théâtre d'opération de l'amiral Ghormley de l'US Navy. MacArthur bouda, mais accepta. Vandergrift disposait de 19,000 fusiliers-marins. Devant la pointe de Lunga, les croiseurs américains ouvrirent le feu vers la zone du terrain japonais et les Marines débarquèrent. La surprise fut complète et il n'y eut aucune résistance. Il n'y avait presque pas de soldats japonais: une trentaine d'ouvriers coréens furent faits prisonniers. Un petit groupe de soldats japonais préfère fuir dans la jungle. Du côté américain, il n'y eut qu'un seul tué: un sergent abattu par un de ses hommes qui croyait apercevoir un Japonais. En revanche, la résistance fut vive sur Toulagi. Les tirs furent nourris et les Marines refoulèrent progressivement leurs alter-égo – des fusiliers-marins japonais – vers des hauteurs et un puits de mine où ils s'entassèrent. Les Américains leur balancèrent des grenades, et scellèrent la mine avec des explosifs: 750 Japonais furent tués, et une cinquantaine de Japonais fuyèrent en nageant vers la petite île voisine de Florida – 14 d'entre eux réussirent; les autres servirent de repas aux requins. Les Marines perdent 117 tués et 215 blessés: plusieurs d'entre eux par des tirs fratricides nocturnes. Sur Guadalcanal, les Marines parachèvent les travaux déjà avancés des ouvriers coréens en agrandissant la piste principale (image gauche), et en débutant la construction d'un plus petit terrain parallèle pour les avions de chasse. Des tentes furent levées, du carburant d'avion fut stocké, certaines provisions débarquées, des baraquements improvisés, et la zone conquise fut appelée Henderson Field – du nom d'un pilote américain tué à Midway. Cependant, le gros du matériel lourd américain et des provisions demeurèrent sur les navires de Turner. Les Marines établirent un périmètre défensif pour sécuriser les terrains d'aviation.

Le périmètre défensif

Les débarquements et l'établissement d'un périmètre défensif

A Rabaul, l'arrivée des Américains à Toulagi et à Guadalcanal déclencha une activité frénétique. Le commandement japonais fit décoller des raids de bombardiers pour disperser les navires de Turner et frapper le périmètre américain d'Henderson Field. Durant deux jours, les bimoteurs japonais perturbèrent le débarquement de matériel des transports américains, et l'aéronavale américaine eut une grande difficulté à les éloigner. Tout le matériel américain trainait en vrac le long de la plage et des deux terrains, et une partie fut détruit par les bombes japonaises. Une faible quantité fut débarquée de nuit dans l'obscurité quasi-totale.

Désastre à Savo

Dans la nuit du 7 au 8 Août, des croiseurs japonais empruntèrent le canal insulaire de l'archipel des Salomons – the Slot – pour tenter de surprendre les navires de Turner ancrés devant la pointe de Lunga. Des croiseurs américains patrouillant près de l'île de Savo, au Nord-Est de Guadalcanal. Les croiseurs japonais repérèrent leurs homologues américains dans une nuit d'encre et les illuminèrent par des projecteurs puissants. Une canonnade nourrie s'en suivit, et les tirs japonais coulèrent le croiseur Quincy et le croiseur australien Canberra. Au Sud-Est, l'amiral Turner pouvait voir les lueurs des tirs et cela l'inquiéta considérablement. Il prit la décision de quitter Guadalcanal un peu avant l'aube pour ne pas servir de cible aux navires japonais "tout près". En levant l'ancre, Turner ordonna aux avions de ses porte-avions de chercher ces navires japonais et de les couler; mais à la levée du jour, ces avions ne virent que des débris flottants et de grandes taches de mazout.

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Le Quincy illuminé par les projecteurs japonais – Le croiseur Vincennes

La bataille de Savo fut le second désastre naval américain depuis Pearl-Harbor. Malgré que les pertes furent limitées, elles eurent un effet démoralisateur important qui éclipsa partiellement la victoire aéronavale de Midway – pourtant beaucoup plus importante. Le vice-amiral n'a pas voulu trouver les transports de troupes américains car il craignait que la présence des croiseurs interceptés masquait celle d'un ou de plusieurs porte-avions américains: il se replia de Savo avant la levée du jour. Mais pour les Américains, le départ précipité de la flotte de Turner signifiait l'abandon des Marines de Guadalcanal à leur sort: 16,000 d'entre eux étaient campés autour d'Henderson Field, et 6000 autres sur Toulagi, et ils ne disposait que d'une semaine de vivres, essentiellement de rations-K, de riz japonais capturé, et de saké...

S'organiser

Le repli précipité des navires de Turner fit sourciller l'adjoint du général MacArthur pour le Pacifique Sud-Ouest, le général Harmond. Ce dernier déplorait et dénonçait l'abandon des Marines ainsi que d'une opportunité de courir sus à l'ennemi après un succès initial sur les deux îles reconquises. Harmond doutait que les Marines abandonnés ne puissent tenir longtemps sans renforts. Dans une lettre à Marshall, il écrit que we have seized a strategic position from which future operations in the Solomons and Bismarcks can be strongly supported. Can the Marines hold it? There is considerable room for doubt. A Washington, l'amiral King dit à Harmond de se mêler de ses affaires dans "sa" zone d'opérations. La 1ère Division de Marines dut s'organiser avec les moyens disponibles pour tenir le coup avant les renforts. Elle fit deux choses:

  1. Elle fortifia son périmètre défensif contre des inévitables renforts japonais.
  2. Elle termina la construction des pistes d'atterrissage – qui furent allongées.

Un destroyer japonais du Tokyo Express chargé de troupes ou de fret pour Guadalcanal...

Mais les Marines pouvaient compter sur de précieux auxiliaires: les Micronésiens furent anxieux d'aider à combattre les Japani, et servirent majoritairement d'éclaireurs pour épier les patrouilles japonaises. Tout comme en Nouvelle-Guinée, les indigènes combattirent majoritairement du côté des Alliés. Mais certains firent plusieurs actions de guérilla.

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Micronésiens en armes – Chaseurs F4F Wildcat

Le 18 Août, Henderson Field était opérationnel, et acceuillit ses premiers avions: une vingtaine de chasseurs F4F Wildcat et P-39 Airacobra. L'US Navy envoya des avions-torpilleurs TBD Devastator que l'aéronavale ne voulait plus sur ses porte-avions. Ces avions arrivèrent avec leurs propres bombes en ailes – embêtant lors d'un atterrissage – et il n'y avait que peu d'essence et pas de pièces de rechange pour entretenir ces appareils. Le 19, une douzaine d'avions d'attaque au sol SBD Dauntless se posa sur Henderson Field, juste au moment où les Marines livrent leur premier combat. Les Japonais ne mirent pas de temps à s'organiser. Le contre-amiral Tanaka organisa une navette nocturne de destroyers et de petits remorqueurs pour acheminer des petits groupes de renforts japonais sur Guadalcanal: c'est le début du Tokyo Express. Le 19 Août, les Japonais débarquèrent un bataillon du 28ème Régiment de fusiliers-marins (900 hommes) à l'Est du périmètre de Henderson Field; l'unité était commandée par colonel Itchiki. Les soldats d'Ichiki sont de vieux guerriers que les Marines n'impressionnent pas. Ces vétérans de la guerre en Chine sont persuadés qu'ils ne feront qu'une bouchée de ces Occidentaux impertinents, mais ils ne prirent aucune précaution particulière pour dissimuler leurs préparatifs et leurs dispositions. Des avions SBD repérèrent les petits remorqueurs côtiers d'Ichiki dans une crique et les coulèrent. Les soldats d'Ichiki essayèrent de se disperser, mais ils furent hachés par les bombes de ces SBD: une centaine de morts gisèrent, certains à demi-enterrés dans le sable bordant leur crique, avant même que ne retentissent les premiers coups de feu (image gauche). Les Japs ébranlés se regroupent dans la jungle.

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Les Marines repoussent l'attaque d'Ichiki – Marines artilleurs à la rivière Tenaru

Lorsque Ichiki déclencha son attaque de nuit, il fit un assaut foudroyant devant des Américains bien armés mais quelque peu désemparés. Celui-ci échoua sous les fracas des armes automatiques, des grenades, et des petits canons de 37mm. Les Japonais profitenr des échanges de tirs pour flanquer leurs adversaires, mais sans succès (clip ci-haut). Lorsque le jour se lève, les survivants japonais furent achevés par un bataillon américain en renfort. De l'avis des Marines, les Japonais furent tous tués parce qu'aucun ne se rendit. Blessé et déshonoré, le colonel Ichiki brûla ses couleurs et se fit hara-kiri. Ichiki – tout comme son supérieur de Rabaul, le général Hyakutake – commit une erreur tactique qui sera plusieurs fois répétée durant la bataille de Guadalcanal: il sous-estima la force de son adversaire américain. Certes, le commandement japonais enverra de Rabaul plusieurs milliers d'hommes sur Guadalcanal, mais jamais assez en même temps pour submerger et vaincre les défenseurs du périmètre. Les attaques japonaises seront des actions limitées – et espacées – que les Marines réussiront à casser, l'une après l'autre, non sans pertes.

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Remorqueurs japonais coulés – Quelques soldats d'Ichiki

Assiégé, le général Vandergrift n'a, à aucun moment, perdu le sens de la réalité stratégique. Il ne s'est pas épivardé en dispersant ses forces sur l'île pour courir sus aux Japonais: il garda le gros de ses Marines à l'intérieur du périmètre de Henderson Field, tout en gardant une petite force de réserve prête pour des actions mobiles à l'intérieur du périmètre ou une distance peu éloignée du périmètre. Il est ravi de constater que le commandement japonais joue son jeu en n'acheminant que de faibles renforts. Le "pattern" d'attaque japonais à Guadalcanal devenait prévisible, au grand plaisir de Vandergrift:

  1. Un groupe de 1500 à 2700 Japonais se font débarquer de nuit par le Tokyo Express.
  2. Ces soldats japonais attaquent de nuit, sans délai.
  3. Les combats sont furieux. Parfois les Japonais culbutent des défenseurs américains
  4. La réserve mobile des Marines repousse les Japonais hors du périmètre.
  5. Le jour levé, les avions américains achèvent/dispersent les attaquants en jungle.
  6. Les éléments japonais perdus sont traqués par les auxiliaires micronésiens..

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Cantonnement américain à Henderson Field – La jungle est neutre

Bloody Ridge

Le 9 Septembre, une brigade japonaise de 6000 hommes commandée par le major-général Kawaguchi, fit un double débarquement de part et d'autre du périmètre américain. Le 124ème Régiment d'infanterie était la principale unité de cette brigade; il fit un coup de boutoir par le sud vers l'un des terrains d'aviation à un endroit où les défenses des Marines laissaient à désirer. Fort heureusement, Vandergrift eut des renforts venant de l'île de Toulagi et ils furent envoyés à ce "soft spot". De surcroit, Vandergrift envoya une partie de sa réserve mobile occuper une crête qui dominait Henderson Field par l'Ouest. Un bataillon renforcé commandé par le Colonel Edson occupa cette crête, dont on voit encore les cicatrices de la bataille (ci-contre à gauche). Le contrôle de cette crête est essentiel pour protéger Henderson Field. Les Marines d'Edson n'étaient qu'à un mille de leur appui d'artillerie et ne perdaient pas de vue le périmètre. Le 12 Septembre, Kawaguchi fit une attaque pour tester la solidité des défenses américaines, pendant qu'un croiseur et deux destroyers firent un pilonnage nourri sur Henderson Field; plusieurs avions furent détruits. Le 13 à 22H30, les Japonais lancent leurs attaques, Edson essaya de contre-attaquer l'ennemi alors aux pieds de la crête, mais il échoua. En soirée, une averse abondante calma l'ardeur des belligérants en réduisant leur visibilité; durant la nuit, les soldats de Kawaguchi firent une attaque sous la pluie contre la crête occupée par Edson, et repoussèrent les Américains au centre de celle-ci. Du haut de cette crête – appelée Crête d'Edson – environ 800 Marines tinrent bons avec des pertes sévères. Au petit jour, l'artillerie des Marines arrosa les pentes de la crête pour en déloger les Japonais qui cherchaient à atteindre les encerclés au sommet de celle-ci. Certaines salves ont même blessées plusieurs Marines. Les pertes japonaises furent sévères: 300 tués en une demi-heure. Les soldats de Kawaguchi se replièrent, et à ce moment, les Marines du périmètre les contre-attaquèrent de flanc par terre et par air: les quelques avions encore en état de voler pilonnèrent les colonnes ennemies qui furent dispersées dans la jungle, sans nourriture, et avec peu d'eau et de munitions. Kawaguchi essaya de contre-attaquer ses adversaires, mais fut tué net par des éclats au visage. Une deuxième manche venait d'être remportée pour les Marines. Les morts japonais trainaient partout, dont sur les pentes de cette crête qui fut surnommée Bloody Ridge. La dureté des combats était amplifié par le fait que les Japonais faisaient souvent semblant de se rendre, et tuaient d'autres soldats américains. Les G.I.s eurent un mot d'ordre informel: pas de pitié pour ces "nips" (ci-bas à droite).

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Le périmètre est attaqué – Mort aux "Nips"

Le 18 Septembre, des transports américains acheminèrent des renforts pour la 1ère Division de Marines US. De la nourriture, de l'aide médicale, des munitions, et une grande quantité de matériel, dont du tapis métallique grillagé pour étendre sur les terrains de Henderson Field. Des pilotes et avions assortis furent également envoyés et formèrent la "Cactus Air Force" – une branche avancée de l'aviation de l'USMC. Plus important pour Vandergrift, fut l'arrivée d'un régiment de Marines de la 7ème Division, en provenance de Samoa: 4262 hommes, avec leur artillerie. Les navires de l'amiral Turner débarquèrent également 3000 barils d'essence d'avion, 147 véhicules, 1000 tonnes de rations et 3000 tonnes de munitions et bombes d'avions. Des hangars furent improvisés, un petit réseau de quartiers et de pillboxes fut creusé.

La "pagode" d'Henderson Field qui sert de QG américain

Les éclaireurs japonais qui regardaient Henderson Field reprendre vie savaient qu'ils devaient attaquer le plus rapidement possible sous peine d'être vaincus à terme. Mais là encore, Turner craignait d'être surpris la nuit par les croiseurs japonais et réappareilla après quelques jours. Ce qui fut une série de petites batailles et d'accrochages sévèrent se transforma en une bataille d'usure d'hommes et de matériel.

La rivière Matanikau

Un gros détachement japonais formé de débris de la brigade de Kawaguchi se préparait à attaquer à l'Ouest du périmètre.Vandergrift envoya des unités occuper le mont Austen qui domine la plaine de Lunga (où se trouvent les terrains d'aviation et les cantonnements improvisés) et patrouiller à la bouche de la rivière Matanikau. Cette fois, la riposte japonaise fut forte et les Marines subirent des pertes. Comme les Marines étaient supérieurs en nombre, Vandergrift envoya Edson faire un petit débarquement de flanc derrière les positions japonaise en utilisant des chalands américains endommagés par les tirs japonais, et même un petit remorqueur japonais. Protégés par le feu d'un destroyer, les Marines américains repoussèrent les Japonais de l'Ouest du périmètre, au prix de 60 tués et de 100 blessés. Ce fut le premier d'une série de petits combats violents, enrayés par la damnée averse quotidienne de fin d'après-midi (ci-bas)

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Une douche froide avant le repas du soir? – Les Japs à gauche, les Marines à droite

Les Japonais avaient établi leur PC de guerre au village côtier de Kokumbona (image gauche); de là, ils pouvaient pilonner Henderson Field. Si les Japonais pouvaient trouer la piste, les avions de la soi-disante Cactus Air Force ne pourraient pas décoller et de nouveaux renforts pourraient être acheminés. Mais tant que les avions américains décolleraient, les Américains garderaient la maitrise du ciel de jour. Les Marines déployèrent deux bataillons hors du périmètre pour attaquer le long de l'embouchure de la rivière Matanikau, protégés par trois bataillons d'artillerie. Ils se heurtèrent au 4ème Régiment d'infanterie. Ce fut une bataille conventionnelle de fantassins. Elle dura deux jours et deux nuits, sous la pluie. Les Marines eurent beaucoup de blessés, mais les Japonais perdirent leur cohésion et une partie de leur régiment fut encerclé dans une poche, le dos à la mer. Recevant des tirs de toute parts, les soldats japonais s'en remirent à des charges à la baillonnette pour essayer de repousser leurs adversaires: ce sont les charges banzaï – souvent aussi sanglantes qu'inutiles.

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Rare photo d'une charge banzai – Une patrouille canine

Sur 1600 hommes encerclés, 11 furent faits prisonniers. Tous les autres se firent hacher de nuit dans des charges frontales sous les lueurs de fusées éclairantes. Pris de court, les officiers japonais claironnaient l'attaque comme au XIXème siècle, ou criaient débilement le totsugeki (chargez!!) le sabre en l'air, comme des personnages anachroniques, face aux mitrailleuses et mortiers. L'autre partie du régiment se fit repousser dans un petit ravin d'où il pouvait recevoir des pruneaux de tous les côtés: 1500 soldats japonais se firent tasser dans ce ravin et sur ce nombre, 700 périrent. Les Marines durent se replier sur leur côté de la Matanikau car les Japonais préparaient encore une autre contre-attaque: ils perdirent 65 tués et 125 blessés. Le 9 Octobre, le général Hyakutake, grand patron de Rabaul, et commandant de la 17ème Armée, arriva à Guadalcanal pour prendre en charge les opérations sur le terrain. Il amena 20,000 soldats et plusieurs bataillons d'artillerie et même de chars. Son adversaire, Vandergrift, en avait 23,000, et de surcroit, un lien aérien grâce aux terrains. Cependant, Hyakutake changea de stratégie et préféra attaquer le périmètre à distance en utilisant des bombardiers, et son artillerie. De surcroît, les croiseurs qui escortaient la force de débarquement japonaise pilonnèrent les cantonnements et Henderson Field, transformant la piste principale en moustiquaire troué. Malgré des difficultés au décollage, tous les avions pouvant voler et porter une bombe furent lancés sur les transports japonais: trois furent frappés et s'échouèrent.

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Cantonnement américain bombardé par les Japonais – Chars japonais malchanceux

Le plan de Hyakutake était d'attaquer le périmètre des deux côtés à la fois, comme Kawaguchi, mais avec des effectifs mieux armés.Le 16 Octobre, il lança ses forces contre des défenseurs ébranlés mais encore avec la pleine possession de leurs moyens. Mais contrairement à Kawaguchi, Hyakutake s'ébranlait avec des effectifs tout pesants d'artillerie et de chars dans une jungle souvent poisseuse et ses hommes arrivèrent épuisés et malades près du périmètre à conquérir. Malgré la jungle, les traces du passage des unités japonaises étaient visibles et les avions américains saturèrent de bombes les stries qu'ils voyaient sous eux: les Japonais eurent des milliers de tués. C'est un Hyakutake considérablement affaibli qui arriva au bord de la rivière Lunga, juste à temps pour se faire massacrer. Le pilonnage des Marines fut bref mais violent. L'officier japonais commandant les chars près de la Matanikau reçut l'ordre d'avancer pour neutraliser les canons américains. Il n'est pas allé très loin. Ses chars furent cassés sur la plage après avoir parcouru moins de 300 mètres (image du haut à droite).

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Pavillon japonais capturé – Micronésien et son trophée

Les unités de Hyakutake encore valides furent mises en déroute. Hareclées par les avions, elles durent abandonner tout leur équipement lourd et une partie de leurs provisions. Les Marines firent plusieurs centaines de prisonniers: essentiellement des blessés laissés sur place pour mourir. Entretemps, pilotes américains et japonais se disputaient le ciel au-dessus de Guadalcanal durant plusieurs jours, mais les résultats ne furent pas concluants pour les belligérants. Les soldats belligérants avaient non seulement à affronter la faim mais aussi la malaria qui fut certainement la plus grande "tueuse" sur l'île: pour un soldat tué au combat, cinq autres moururent par cette maladie.

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Combats aériens au-dessus de Guadalcanal

Encore Bloody Ridge

Comme les flancs Sud-Est et Sud-Ouest du périmètre américain semblaient imprenables, il restait la crête sanglante. Le 24 Octobre, un régiment de Marines défendait âprement la crête d'Edson depuis le début de ce mois. Les Japonais auraient à faire face à des défenses mieux préparées qu'en Septembre. Lorsque le général Vandergrift s'aperçut que la crête sanglante serait le point de percée pour les Japonais, Vandergrift achemina d'autres renforts de son périmètre pour renforcer la crête d'Edson - ou crête sanglante.

La dernière attaque japonaise du périmètre américain

Les renforts se glissèrent dans la nuit. Après un court pilonnage d'artillerie japonais, l'artillerie des Marines commença à donner et il y eut trois tentatives de prendre la crêtes. Elles échouèrent toutes. Pris de court, les Japonais firent encore des charges banzaï qui aboutirent à un massacre. Ces charges furent fauchées par les armes automatiques et les grenades américaines (ci-bas à gauche). En revanche, lorsque des patrouilles américaines quittent leur périmètre défensif pour faire la chasse aux Japs, celles-ci ne peuvent plus compter sur la protection de leur artillerie, et se font facilement infiltrer par les soldats japonais qui les embusquent presque à bout portant. La baionnette et la mitraillette Thompson s'avèrent plus utiles que l'artillerie (clip ci-bas).

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Souvent, la chasse en herbes autres produit des résultats mitigés...

Les Japonais avaient perdu 3500 tués à la base de la crête et devant les pillboxes américains, incluant tous les officiers adjoinds de Hyakukate - dont Furumiya - qui firent le serment de vaincre ou de mourir sur place. Les chasseurs japonais furent présents au-dessus de Henderson Field, surtout pour tenter de semer la confusion durant les combats terrestres. Des fusiliers-marins pilotes, comme Joe Foss et Marion Carl, abbatirent plusieurs appareils japonais durant la durée de la bataille de Guadalcalal. Malgré les pertes qu'il a subi, Vandergrift recevait constamment des renforts en hommes et en matériel, protégés par la Cactus Air Force. Le 18 Octobre, l'amiral Ghormley fut relevé de son commandement naval du Pacifique Sud-Ouest au profit de l'amiral Halsey. Dès lors, Halsey et Vandergrift afficheraient la détermination et la compétence pour finir la campagne. Même Roosevelt leur donna un appui public. La 25ème Division d'infanterie US partit d'Hawaii pour Guadalcanal.

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Joe Foss et son petit commentaire Après Bloody Ridge...

Le volet aérien de la bataille n'est pas négligeable. Bien que cette campagne fut livrée et gagnée par les forces terrestres, les aviateurs des deux camps contribuent à épauler leurs camarades qui se battent dans cette jungle boueuse. Le gros de l'effort aérien japonais fut essentiellement d'interdire l'acheminement de renforts par mer en attaquant les navires de soutien américains, tout en multipliant les attaques sur Henderson Field. Le rôle des éléments aériens de l'USMC connus sous le surnom de "Cactus Air Force" était d'incercepter les bombardiers bimoteurs G4M Betty et leurs chasseurs d'escorte A6M Zéro et Ki-43 Oscar pour s'assurer d'une maîtrise locale du ciel au-dessus de Guadalcanal. Là-encore, ce fut une guerre d'usure: abattre le plus grand nombre d'appareils ennemi possible. Peu à peu, les Américains obtiennent l'avantage en basant un nombre croissant de chasseurs, d'avions d'attaque en piqué SBD, et même de quadrimoteurs B-17 sur Henderson Field. A compétences égales derrière le manche à balais, les pilotes belligérants essaient d'utiliser les meilleures avantages de leurs appareils pour gagner leurs duels.. Ainsi, les pilotes de l'USMC remportent de nombreuses victoires, malgré le fait qu'ils étaient désavantagés par le manque de maniabilité de leur chasseur F4F Wildcat. Les chasseurs japonais étaient plus rapides et maniables que ceux de leurs adversaires, mais beaucoup plus fragiles aux tirs. Le F4F pouvait encaisser plusieurs projectiles en voilure et dans le fuselage sans flancher (ci-contre à gauche), alors qu'une seule rafale bien placée suffisait à abattre un chasseur nippon. Le F4F est armé de six mitrailleuses Browning de calibre .50 avec projectiles traceurs-incendiaires. Pour compenser sa lourdeur, le F4F mise sur sa vitesse en piqué pour surprendre son adversaire en l'attaquant par le haut au même titre qu'un Me-109 allemand. Il évitera de tourner pour ne pas perdre de la vitesse. Les chasseurs japonais, eux, attaquent habituellement par paires et misent sur leur vitesse ascentionelle pour attaquer l'ennemi par le dessous, et le contraindre à tournoyer, permettant ainsi aux pilotes nippons de mirer rapidement l'adversaire.

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John-L.Smith est un modèle pour ses pairs –– Saburo Sakai sera le "top gun" japonais

Quelques pilotes américains se distinguent rapidement: Joseph Foss, avec 26 victoires confirmées, dont l'escadrille a abattu 72 appareils ennemis. John-L.Smith, avec 19 victoires confirmées. John Wesolovski avec 7 victoires confirmées, et Jefferson DeBlanc, qui devient un as en abattant 5 appareils durant la seule journée du 31 Janvier 1943. Du côté japonais, Saburo Sakai sera crédité de 8 victoires confirmées au-dessus de Guadalcanal, avant d'être abattu par le mitrailleur arrière d'un SBD ennemi. Rescapé par ses camarades, il deviendra un des meilleur as japonais de la guerre avec 64 victoires. Quant à Takeo Okumura, il abattera 35 avions ennemis, dont 10 dans une seule journée de Septembre 1942.

Santa Cruz

Devant la mauvaise posture de l'armée japonaise à Guadalcanal, l'Amirauté ne pouvait pas rester l'arme au pied. Elle fit acheminer une flotte aéronavale importante basée à Truk et commandée par les amiraux Yamamoto et Kondo au Sud-Ouest des Salomons pour bloquer toute possibilité de renforcer la garnison américaine à Henderson Field: 4 porte-avions, 4 cuirassés, 9 croiseurs de bataille, 4 croiseurs, 31 destroyers et une douzainne de submersibles. L'amiral Halsey dépêcha sa Task Force 4 comprenant 2 porte-avions (Enterprise et Hornet), 2 cuirassés, 4 croiseurs de bataille, 9 croiseurs, et 19 destroyers. Les forces aéronavales japonaises comprenaient 212 appareils embarqués contre 161 appareils pour les Américains. Malgré ces imposants moyens, les deux flottes de guerre ne s'aperçurent pas.

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La zone du combat – Le Hornet est attaqué

Les deux vagues d'avions se cherchèrent, mais ce fut les Japonais qui repérèrent les Américains. Les chasseurs américains et avions japonais bataillèrent dûrement: 100 avions japonais furent abattus contre 74 pour les Américains. En revanche, les pilotes japonais coulèrent le porte-avions Hornet et endommagèrent l'Enterprise. Le Hornet reçut 9 torpilles et quelques bombes perforantes. Il prit feu en se cabrant; mais resta à flots. Il fut achevé par un destroyer japonais qui lui lança 4 autres torpilles. La bataille ne fut pas concluante: elle fut un succès pour les Japonais mais les Américains réussirent à paralyser l'envoi de transports de troupes vers Guadalcanal, et c'était le but qui était rechercé par les deux belligérants.

Un tonnerre naval

Yamamoto essaya un autre coup de poker. Il opta pour faire faufiler deux cuirassés japonais le Hiei et le Kirishima en pleine nuit devant la pointe de Lunga pour faire un pilonnage systématique de Henderson Field. A ce moment, les terrains d'aviation américains comptaient près d'une soixantaine d'avions et un gros stock de bombes et de carburant. Pour cette mission, les deux cuirassés portaient un nouveau type d'obus de 14" qui comprenant 470 sous-munitions incendiaires pour faire du tir de saturation et enflammer tout ce qui peut brûler. Les deux cuirassés seraient accompagnés de 10 destroyers et d'un croiseur. L'amiral Abe mena l'attaque dans la nuit du 12 au 13 Novembre.

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Le pilonnage fait par les cuirassés et croiseurs japonais

Jamais Henderson Field ne connut une pareille purée de pois. Les obus explosifs et à sous-munitions détruisirent tous les hangars et abris américains.Le matelas métallique recouvrant les pistes fut endommagé à plusieurs endroits. Plus de 100 Américains furent tués et plusieurs centaines d'autres blessés. Les autres se terraient à demi-sourds dans leurs abris et bunkers de fortune. Il y eut des crises d'hystérie à cause du fracas. Des morceaux de corps volent partout. Une partie de la réserve de carburant d'avion flamba, et le parc d'avions fut transformé en un clos à rebut un boneyard. Plus de 300 obus de 14" furent tirés par les trois grands navires. Cette attaque navale nocture de Henderson Field était le prélude à un débarquement frontal directement sur la pointe de Lunga. Les transports de troupes étaient commandés par l'amiral Tanaka. Halsey avait deux élgers avantages sur Yamamoto: il était à la fois un bon joueur de poker et disposait de bons renseignements sur les mouvements de la flotte japonaise. Il comprit sur-le-champ que la bataille de Guadalcanal reposait sur un engagement naval immédiat avec les cuirassés de Abe, sinon, ce serait la catastrophe pour Vanderbilt et ses hommes.

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Les dégats sont importants Le Hiei cartonne les navires américains

Halsey ordonna au contre-amiral Callaghan d'amener ses 13 navires de ligne à Guadalcanal. Les navires américains avaient l'avantage du radar, contrairement aux Japonais. En revanche, les marins japonais étaient parfaitement entrainés aux combats de nuit. Callaghan arriva devant Guadalcanal la 01H30. Il prit les navires japonais en sandwich entre ses cuirassés et son petit écran de destroyers. Callaghan disposait du cuirassé Washington, muni de tourelles à pièces de 16". Il profita du pilonnage japonais de Henderson Field pour mieux se rapprocher des navires ennemis qui n'avaient pas détecté la présence des navires américains. A 0H30, le combat naval commença: Les navires américains ouvrirent le feu sur les navires japonais pour ne pas qu'ils aient le temps de changer de type d'obus. Un destroyer américain imprudent, le Cushing, ouvrit le feu contre le cuirassé japonais Hiei qui riposta et le neutralisa, de même que trois autres destroyers américains (peinture ci-bas). Les cuirassés San Francisco et Altlanta.

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Les cuirassés Kirishima et Washington

échengèrent des salves avec le Hiei, mais bien que ce dernier fut endommagé, les deux navires américains furent estropiés. Les tirs du Hiei furent plus précis et firent des dégats, et tuèrent le contre-amiral Callaghan, de même que tous les officiers subalternes dirigeant l'attaque. De plus, le croiseur Portland encaissa une bordée japonaise qui le mit hors de combat et le navire américain se retira du combat. Il sera remorqué à Toulagi quelques heures plus tard. D'autres destroyers américains essayèrent de se rapprocher des navires de ligne japonais pour lancer leurs torpilles, mais ils furent tous endommagé, et l'un d'entre eux, le Barton, explosa lorsqu'il reçut une torpille du croiseur Amatsukaze. Le combat se poursuivit durant un moment dans une atmosphère surréaliste d'éclairs de canons, de fusées éclairantes, de fumées, et de la lumière des projecteurs japonais. Les deux flottilles belligérantes se retièrent vers 02H30. Malgré qu'il ait presque gagné la partie, Abe fut ébranlé par le combat et ses pertes. Au lever du jour, des avions-torpilleurs TBF américains repérèrent le cuirassé Hiei endommagé la nuit précédente avec un bri de gouvernail. L'aéronavale l'attaqua durant quatre heures et le frappa mortellement; l'équipage le saborda.

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Le Washington tire une bordée Le Hiei s'esquive en vain — Le combat entre les deux flottilles

Dans la nuit du 14 et de 15, une seconde bataille navale nocturne fut livrée au même endroit. Malgré leurs pertes, les Américains avaient une supériorité de deux contre un en cuirassés: le South Dakota et de Washington contre le Kirishima. La seule différence avec le combat de la nuit précédente était que les transporteurs de Tanaka feraient leur débarquement en même temps que la bataille navale. Cette fois, les navires japonais furent commandés par l'amiral Kondo. La bataille navale dura un peu plus d'une heure; les Japonais étaient désavantagés en puissance de feu. Le cuirassé Kirishima fur frappé par de nombreuses bordées; il chavira et coula quille en l'air. Un destroyer japonais fut également coulé. Les Américains perdirent deux destroyers, mais se concentrèrent sur les navires de transports japonais: 4 navires furent coulés et 2 autres furent contraints de s'échouer. Lorsque le jour se leva, les navires américains détruisirent les navires échoués (image ci-bas) et forcèrent 2000 survivants à s'enfuir dans la jungle, avec peu d'armes, peu de nourriture, et surtout sans ordres précis: ils furent livrés à eux-mêmes. Les autres milliers de soldats japonais transportés par les navires de Tanaka coulèrent avec leurs navires et la plupart des survivants furent dévorés vifs par les requins, alors qu'ils tentaient de rejoindre la rive à la nage.

La fin

Devant l'arrivée constante de renforts, Vandergrift continua d'attaquer les Japonais pour les déstabiliser d'avantage. Le 3 Novembre, six bataillons du colonel Edson firent une reconnaissance en force et encerclèrent 700 soldats Japonais à la Pointe Cruz, le dos à la mer. Ils éliminèrent également 300 autres soldats qui se rassemblaient encore autour du périmètre. Un petit débarquement japonais sur la Pointe Koli fut vite rejeté à la mer par les Marines et par des éléments du 164ème Régiment d'infanterie US: 1500 soldats furent tués dans des combats de chouans, toujours autour du périmètre. Hyakukate abandonna la tactique d'attaque simultanée des deux côtés du périmètre, et ordonna la retraite de ses forces au petit village côtier de Kokumbona. Mais le général japonais n'avait plus de village où se retirer car les avions américains du Cactus Air Force avaient détruit l'endroit, de même que le terminal japonais sur la pointe de l'île.

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Prisonniers japonais Le "terminal" de Tannambogo

Plus de 500 Japonais furent tués par les Américains et les Micronésiens. Il y eut également de nombreux prisonniers cueillis. Halsa ordonna à Vandregrift de quitter son périmètre pour poursuivre et achever les hommes de Hyakukate.Vandergrift n'était pas d'accord à disperser ses forces, mais dut se plier à l'ordre de son supérieur. Il était temps, car Hyakukate recevait des forces débarquées à l'aurore à Kokumbona. Bien que les avions du porte-avions Enterprise et ceux de la Cactus Air Force coulèrent 7 des 11 transports de troupe de Tanaka, Hyakutake disposait de 10,000 troupes fraiches et bien équipées. Mais Vandergrift disposait également de nouveaux renforts arrivés de la Nouvelle Calédonie et de Samoa. Entre le 18 et le 30 Novembre, il fit trois attaques aéro-terrestres contre les forces de Hyakutake. Comme les combats étaient menés conventionellement, les pertes furent importantes dans les deux camps, mais elles furent critiques pour la Japonais car leurs vivres, munitions, et fournitures médicales furent détruites ou perdues.

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Morts pour l'Empereur...

Dans ces seuls combats, les Marines eurent 681 tués et plus de 2000 blessés qui exigaient leur évacuation de l'île. La 1ère Division de Marines fut si amochée qu'elle dut être évacuée de l'île vers l'Australie pour reconstituer ses forces. Hyakutake n'eut le choix que de s'avouer vaincu. Le 2 Décembre, il ordonna l'évacuation progressive nocturne de ses soldats par le Tokyo Express: destroyers, barges motorisées, remorqueurs semi-hauturiers, et petits cargos prirent d'énormes risques pour évacuer la plupart du temps avec succès plusieurs milliers de soldats à la fois. L'opération s'échelonna durant huit semaines. Cependant, quelques milliers "d'égarés" japonais trainaient dans la jungle dans les hauts plateaux de l'île. Ils ne constituaient plus une menace pour les Américains, mais un facteur de nuisance qui pourrait gêner la tête de pont de Henderson Field. La meilleure opération japonaise d'évacuation fut conduite par le contre-amiral Koyogani, dans la nuit du 7 au 8 Février 1943: 13,000 soldats s'embarquèrent pour Rabaul dans une vingtaine de bateaux, sans une seule égratignure.

Renforts en provenance de Nouvelle-Calédonie_

L'US Army débarque enfin Le mopping? On laisse ça aux GI's

La conquête de Guadalcanal est terminée. Les unités de Marines du général Vandergrift ont tenues le coup et contre-attaqués leurs adversaires avec succès. Le 9 Décembre, Vandergrift cède le terrain à la 1ère Division d'infanterie US commandée par le général Patch. Les Marines étant évacués, le général Patch entreprit de poursuivre la construction de la piste de Henderson Field. Quant aux Japonais qui n'ont pas été évacués, il meurent de faim à raison de quelques dizainnes de soldats par jour. D'autres, plus fanatiques, atteignirent les hauts-plateaux de l'île pour y construire abris et pillboxes. Traqués par les Micronésiens, ils n'ont d'autre espoir que de mourir pour leur Empereur en tuant le plus grand nombre de leurs adversaires. Durant la première moitié de 1943, ces petits groupes de Japonais armés tentent des raids de guérilla, sans succès. L'armée américaine entreprit deux opérations de nettoyage de ces irréductibles. N.B L'action du film de guerre américain Thin Red Line (photo couleur en haut de page) se situe dans ce contexte: l'île est conquise et le gros des combats sont terminés; il ne reste qu'à déloger des irréductibles affamés et désemparés sur ces hauts plateaux.

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Henderson Field devient une base opérationnelle — Positions résiduelles japonaises tenaces

Le bilan

La bataille de Guadalcanal fut un désastre militaire pour les Japonais: il fut à la fois un revers le Stalingrad du Pacifique et le tournant dans la campagne du Pacifique. L'echec militaire ne fut pas que tactique, mais stratégique: il draina tant de ressources militaires japonaises vers la destruction que le haut-commandement avait perdu l'initiative de ses opérations maritimes et terrestres. Le commandement japonais de Rabaul détourna des divisions japonaises basès aux Phillipines, en Malaisie, en Birmanie et ailleurs dans le Pacifique pour se faire noyer ou détruire, tour à tour dans cet enfer vert. A partir de de Février 1943, l'initiative stratégique passa des Japonais aux Américains: la reconquête du Pacifique pourrait commencer. Les Japonais perdirent 25,000 tués sur l'île de Guadalcanal, dont environ 9000 des suites de leurs blessures ou par la faim et la maladie. Près de 10,000 autres périrent loers que leurs navires de transport furent coulés par les Américains. Environ 1000 furent faits prisonniers souvent attirés par l'odeur des cuisines de Henderson Field. Les Américains perdirent 1600 tués et 5200 blessés.

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Vestiges de guerre: Un bombardier G4M Betty, une péniche automotrice, l'épave du porte-avions Hornet

S'il existe une campagne militaire qui a condamné une nation à une défaite militaire, ce fut bien celle de Guadalcanal. Cette campagne de six mois a stoppé le Japon dans tous ses espoirs de conquête. Guadalcanal fut une bataille menée sur trois dimensions: terre, air et mer. En plus d'avoir perdu plusieurs milliers de soldats aguerris, l'aéronavale japonaise perdit 600 de ses meilleurs pilotes, dont de nombreux instructeurs. Elle préfigure l'usure et de dépérissement qui attendent les troupes du Mikado en garnison aux Phillippines, en Chine et, surtout, en Birmanie. Pour les Américains, la victoire de Guadalcanal permettra d'amorcer la reconquête du Pacifique.

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